Moi j'ai démissionné l'année dernière. J'avais déjà pris une dispo pour reprise d'études dans la com' en 2014. Cela n'a pas abouti à un emploi stable, alors j'y suis retournée... Après cette pause, je me suis naïvement dit que j'allais être "plus forte" mais c'était pareil qu'avant. Re-affectation loin de chez moi, studio à la semaine alors que j'suis mariée et puis l'année suivante, re-demande de mut' et re-affectation dans un autre secteur encore loin de chez moi alors que j'étais enceinte. Là, c'était trop pour moi. J'ai eu de la rancœur contre l'institution et son fonctionnement dans le secteur public. Peut-être suis-je trop fragile pour me "taper" (excusez-moi du registre) 3 heures de route par jour enceinte mais bon. Quand il a fallu y retourner après mon congé mat', j'ai tenu 3 mois et avec un bébé, c'était définitivement STOP pour moi, ma vie familiale et ma santé. Je veux bien être au service du public, c'est pour ça que j'ai été prof, j'voulais aider les élèves... maintenant, j'ai cheminé et je sais que mon problème était que j'avais besoin de plus de reconnaissance... or je pense qu'attendre de la gratitude, c'est vain. D'ailleurs dans d'autres métiers aussi. La nature humaine est ainsi faite, il faut être capable de 'donner, donner, donner' sans forcément attendre de remerciements.
Malgré tout, je ne regrette pas d'avoir 'servi'. Cette expérience m'a appris à mieux me connaître. "Connais-toi-toi-même" merci Socrates!
J'aurai préféré continuer une carrière dans l'enseignement mais la démotivation de certains élèves a eu raison de MA MOTIVATION. Je me concentrais QUE sur ce qui n'allait pas. Les classes que j'avais étaient souvent difficile et puis j'étais toujours la nouvelle qui doit faire sa place
'alors, ca se passe bien avec les élèves, tu prends tes marques?'. C'est vrai qu'une mutation chaque année, ça aide pas. Peut-être est-ce là mon plus grand regret, ne jamais avoir vu l'évolution en termes d'apprentissage des élèves que j'ai eu. Mais comment tenir aussi loin de chez soi et de sa famille? Je sais que beaucoup de personnes le font dans d'autres métiers, c'était juste pas pour moi.
Sinon, au niveau des parents, j'ai eu quelques mauvaises surprises oui, comme la plupart d'entre nous. Des parents qui te disent comment faire ton métier ou ceux qui te font comprendre que l'élève ne doit pas avoir 'une vie facile' à la maison vu le discours des parents. De la misère sociale aussi dans certains secteurs. De la psychologie, oui j'en ai fait. Cela a t-il été utile, je n'sais pas.
Au niveau de la hiérarchie, pas de conflits mais dans certains établissements, un manque d'investissement (principal jamais présent dans la cour ou dans les couloirs, limite il se cache), d'autres incompétents et CHUT! ce n'est pas si grave, RAS ici, il faudrait pas que notre établissement soit mal noté... hum hum... d'autres très compétents qui gèrent des situations que je n'aimerais pas gérer, à l'écoute de l'équipe éducative. Bref, je n'aime pas généraliser, je préfère nuancer, ça dépend tellement des endroits et des personnes.
Désolé, je suis un peu longue mais les principales raisons qui m'ont poussées à démissionner de l'EN sont :
1)
Difficile conciliation entre vie pro et vie perso (j'avais du mal à bosser mes cours au collège) + fatiguant de rentrer chez soi et de devoir se remettre à préparer le cours des 4B ou corriger les copies des 3E pour pouvoir les rentrer sur Pronote avant le conseil....
2)
Les relations trop souvent conflictuelles à mon goût avec les élèves (j'ai essayé pas mal de choses mais je ne supportais plus certains élèves qui s'en fichait totalement de l'anglais depuis la 6è...) dur dur de rattraper ça quand même. En plus le flicage, ça me fatigue; Je sais que certains collègues disent que ça fait partie du métier, mais moi j'avais passé mes 4 années dans un collège rural bien tranquille où quand certains devenaient trop gênants, ils étaient mis à la porte. Pas la solution, je sais.... (PS : souvenir de ma 1ère année avec des 3è segpa : en 4 mois, 3 nouveaux élèves exclus d'autres établissements qui se vantent de leurs prouesses, youpi, je vais m'éclater!)
3)
Peu de perspectives d'évolution et salaire peu attrayant au vu d'autres pays européens. Mon amie allemande et son mari sont largement plus payé que moi. Certes, ils font quelques heures de plus mais moi je travaille plus à la maison, les 18h semaine, c'est sur le papier seulement.
4)
Marre des gens qui dénigrent le profs ou les envient pour la sécurité de l'emploi, les VACANCES, (j'en connaît plusieurs qui tiennent uniquement grâce à ça, non?!
) + les élèves qui se permettent de dire ' ah la prof d'histoire, elle rend jamais les copies rapidement alors que vous si!' J'me pensais, ouais mais elle a pas mal de trajet matin et soir et 3 gamins en bas âge... toi t'habites à 500 mètres du collège... en gros, on est au supermarché : les élèves consomment les cours et exigent que le service soit parfait. Heureusement, il y a aussi des élèves SUPER! Ouf! On reste aussi grâce à eux. Moi, ça n'a pas suffit.
Tant pis pour la famille qui ne comprend pas toujours comment on peut démissionner d'un métier aussi sécurisant par rapport au marché de l'emploi actuel? Heureusement, ça commence à se savoir qu'il y a moins de candidats au CAPES et on se demande bien pourquoi dit donc...
Tout cela est bien décevant pour le système scolaire français. Les écoles démocratiques et l'école à la maison se multiplient. Je ne dit pas que c'est bien ou mal mais c'est en tout cas révélateur d'une défaillance du système actuel.
Ah, j'allais oublier, pour ceux qui hésitent à franchir le cap de la démission : une collègue m'a dit un jour 'tu as du courage de démissionner'. Non, il faut du courage pour rester quand on est malheureux dans son travail au quotidien.
J'ai compris qu'il fallait que je parte maintenant et que ça ne servait à rien d'attendre, je me serais fait trop de mal pour rien. Pour une fois, j'ai arrêté de penser aux élèves, j'ai pensé à moi.
La lecture du livre de Rémi Boyer et Horenstein m'a aidé à faire le point.
J'ai travaillé dans la prévention scolaire (santé/sécurité/bien-être/harcèlement scolaire...) en intervenant dans les classes, je gagnais le même salaire qu'en étant prof avec plus d'avantages (13è mois, tickets resto, véhicule, chèques cadeaux Noël...). C'était intéressant, plus de travail à la maison, des élèves plus calmes avec une intervenante extérieure et leur prof principal dans la classe et supports ludiques. (PS : en parlant en français, c'est quand même beaucoup plus facile, j'ai plus entendu : 'oh, j'comprends rien!!)
Mais maintenant je veux retrouver le contact avec les langues étrangères alors je cherche un emploi qui me permettra de les pratiquer et plus de les enseigner!
Quite different, isn'it?
En tout cas, la reconversion, c'est toujours possible mais ça demande du temps, de la réflexion et un peu de stratégie. Moi, j'étais déterminée à ne pas finir aigri en salle des profs.
Bravo aux collègues qui aiment leur métier et participent à l'éducation des futurs citoyens. Ce n'était pas pour moi, c'est tout!
Bon courage à tous, quelque que soit votre parcours,
never do something you don't like!